jeudi 12 juin 2014

Rencontre avec un passionné



Aujourd'hui je vais vous présenter un passionné. Sa passion et son métier, élever les meilleurs rhums possibles. Je l'ai rencontré à l'Habitation Saint Etienne. C'est le lieu où est embouteillé le rhum HSE et sont élevés les rhums vieux, la distillation se faisant elle à la distillerie du Simon au François.

Cyrille Lawson est en  charge de l'élevage des rhums vieux et de la mise au point des différentes cuvées de la marque. Malgré son nom évocateur des landes écossaises, il est né dans la vigne bordelaise et officie en Martinique chez HSE depuis treize ans. Il est devenu un vrai martiniquais d'adoption.

Les chais HSE

Après une rapide visite de l'Habitation, de la maison de maître, des jardins et dépendances, nous attaquons le vif du sujet par la station d'embouteillage afin d'arriver au coeur du métier de notre hôte, c'est à dire à la conduite de l'élevage des rhums et la mise au point des différentes cuvées HSE. Là, au milieu des fûts, des tonneaux et des foudres, nous découvrons un homme passionné, passionnant, intarissable sur son métier, et d'une grande précision.

La chaine d'embouteillage.

Sans dévoiler de secrets et process propres à l'entreprise, il nous fait part du soin apporté au vieillissement, notamment sur le mode de stockage des tonneaux, du grand soin apporté à l'ouillage. Un seul tonneau mal rempli pourrait gâcher, par le goût des champignons qui se seraient développés à l'intérieur, tout un assemblage de vieux rhums d'une cuvée en préparation. 

Préparation d'un assemblage VSOP.

A la recherche, non d'une perfection chimérique, mais d'une qualité remarquable, il a développé par exemple des partenariats avec ses fournisseurs, mettant au point des tonneaux répondant à la recherche de composants organoleptiques précis. Ces expérimentations portent sur la qualité du bois, sur le mode de chauffage dans la mise en forme et bien d'autres expérimentations que je ne saurais vous dévoiler sans trahir mon engagement de discrétion. Ce partenariat permet de gagner du temps dans l'élaboration d'une typicité recherchée, et de ne pas attendre dix ans pour voir le résultat et découvrir à la dégustation si le but recherché a été atteint.

En dehors de la gamme des rhums vieux habituels (vieux, très vieux, hors d'âge, millésimé, single cask) HSE est sorti des sentiers battus et cherche pour reprendre leurs propres termes, à casser les codes.
Pour ce faire sous la conduite de Cyrille Lawson, ont été mises au point, depuis quelques années des finitions dites du Monde, afin d'offrir un plus large panel de saveurs aux amateurs. Ce dernier nous a encore parlé avec passion de la mise au point de ces cuvées et de ses recherches permanentes dans l'affinement des produits proposés. Les rhums ayant vieilli en général six ans dans des fûts de chêne sont ensuite transvasés dans des fûts ayant contenu du single malt de l'ile d'Islay ou des Highland, du sherry Fino et Olorosso ou Pedro Ximenez et plus récemment du sauternes la Tour Blanche. Une fois transvasé, le rhum séjourne encore pendant dix huit mois pour finir son vieillissement dans les différents fûts concernés. Tout cela se fait en développant des partenariats avec les producteurs de whisky et de sauternes ou de sherry qui fournissent les fûts.

Fût d'Islay.

Fût d'Highland.

Fût de sherry.

Fût de Sauternes.

Cette rencontre s'est terminée bien sur par une dégustation dans les règles de l'art sous la conduite du maître, qui nous guidait dans la découverte de la personnalité de chaque cuvée. Quand à choisir entre les différentes finitions, c'est à chacun de trouver son chemin et les arômes qui le séduisent. Grâce au travail de professionnels comme Cyrille Lawson les rhums martiniquais deviennent des eaux de vie de plus en plus complexes et sophistiquées, ce qui fait leur succès grandissant dans le monde.

Cyrille Lawson chaleureux, enthousiaste, attentionné, en grand professionnel nous guida à la découverte de ses cuvées.

En ce qui me concerne, j'avoue qu'à la sixième dégustation j'ai été largué, il est grand temps que j'éduque mes papilles !!!

Et sur ce je vous dis:

a an lot soley !
à un autre soleil !


dimanche 8 juin 2014

L'atelier de M.Evariste



Cela fait des années que je passe devant une petite case insignifiante, recouverte de tôle à l'entrée du bourg du Marin, cela chaque fois que nous nous rendons à la plage aux Salines ou à la Pointe Marin. Je n'y avais jamais porté la moindre attention  avant , à l'occasion d'un ralentissement du trafic routier, d'y avoir vu un homme assis derrière une machine à coudre. Cette case qui n'avait qu'un pâle souvenir de sa dernière couche de peinture était un atelier de couture.

Dès que l'occasion se présenta, je me rendis à cet atelier. C'est le lieu où M. Evariste déploie ses talents de couturier. Après m'être présenté, je lui demandai l'autorisation de photographier son atelier, ce qu'il accepta de bon coeur, m'expliquant avec fierté que sa case avait plus de soixante dix ans, qu'elle avait résisté à tous les cyclones, et qu'elle avait suscité l'intérêt de photographes professionnels de passage.

L'atelier sous son arbre à pain.


 Entre M. Evariste et moi la glace fut rompue rapidement quand je lui dis que ma mère avait fait le même métier que lui. Nous pouvions tous les deux parler chiffons et contraintes du métier, ou de ces belles dames pressées de recevoir leur robe neuve mais moins pressées de payer la couturière.


En effet ma mère a été ce qu'on appelait une couturière en chambre. Je me souviens l'avoir toujours vue se mettre tous les matins au travail à six heures trente en écoutant la radio sur son petit transistor. Elle le faisait en s'assurant fermement dans le même temps que toute la maisonnée se mettait en ordre de marche pour le rendez vous de l'école. Sa grande fierté a été, grâce à  ce métier d'avoir élevé ses quatre enfants, et ce comme elle aime à le dire, sans allocations ni aides publiques.
 Grâce à cela j'ai appris à faire moi même mes ourlets de pantalons, mais surtout j'étais en quelque sorte le commis de ma mère. Je connaissais toutes les merceries de Fort de France où j'allais acheter du fil, des agrafes, des boutons pressions, des fermetures éclair, du gros grain ou des rubans de biais et bien d'autres fournitures. Le gros grain servait à faire des ceintures assorties aux robes ou à renforcer la taille des jupes. Je me payais en grapillant quelques centimes sur la monnaie rendue lors de ces achats. Ces courses étaient courantes, car ma mère n'avait pas de stock et elles étaient fonction des commandes. Mais il y avait une corvée que je détestais, c'était la livraison aux clientes qui parfois en guise de paiement me disaient: " Dis à ta manman que je vais passer la voir."
Je n'étais pas un bon encaisseur! 

M. Evariste fier de sa machine professionnelle.


M. Evariste a une clientèle aussi bien féminine que masculine, dans son atelier règne un apparent fouillis qui dans mon souvenir est le propre de tous les ateliers de couture.


Quelques sources d'inspiration sous la protection de la sainte Vierge.
Autre icône de M.Evariste le Che.

M. Evariste à qui je racontais tout cela, me parla à son tour de son métier qui lui permettait de vivre et d'assurer l'éducation de ses deux enfants. Nous échangions pendant qu'il achevait les finitions d'une robe traditionnelle dans un tissu imitation madras. Après avoir pris quelques clichés, je lui promis de lui ramener des tirages.

 J'ai eu le sentiment un instant d'être hors du temps parlant à un survivant.



Et comme toujours je vous dis

à un autre soleil !
a an lot soley !