dimanche 8 juin 2014

L'atelier de M.Evariste



Cela fait des années que je passe devant une petite case insignifiante, recouverte de tôle à l'entrée du bourg du Marin, cela chaque fois que nous nous rendons à la plage aux Salines ou à la Pointe Marin. Je n'y avais jamais porté la moindre attention  avant , à l'occasion d'un ralentissement du trafic routier, d'y avoir vu un homme assis derrière une machine à coudre. Cette case qui n'avait qu'un pâle souvenir de sa dernière couche de peinture était un atelier de couture.

Dès que l'occasion se présenta, je me rendis à cet atelier. C'est le lieu où M. Evariste déploie ses talents de couturier. Après m'être présenté, je lui demandai l'autorisation de photographier son atelier, ce qu'il accepta de bon coeur, m'expliquant avec fierté que sa case avait plus de soixante dix ans, qu'elle avait résisté à tous les cyclones, et qu'elle avait suscité l'intérêt de photographes professionnels de passage.

L'atelier sous son arbre à pain.


 Entre M. Evariste et moi la glace fut rompue rapidement quand je lui dis que ma mère avait fait le même métier que lui. Nous pouvions tous les deux parler chiffons et contraintes du métier, ou de ces belles dames pressées de recevoir leur robe neuve mais moins pressées de payer la couturière.


En effet ma mère a été ce qu'on appelait une couturière en chambre. Je me souviens l'avoir toujours vue se mettre tous les matins au travail à six heures trente en écoutant la radio sur son petit transistor. Elle le faisait en s'assurant fermement dans le même temps que toute la maisonnée se mettait en ordre de marche pour le rendez vous de l'école. Sa grande fierté a été, grâce à  ce métier d'avoir élevé ses quatre enfants, et ce comme elle aime à le dire, sans allocations ni aides publiques.
 Grâce à cela j'ai appris à faire moi même mes ourlets de pantalons, mais surtout j'étais en quelque sorte le commis de ma mère. Je connaissais toutes les merceries de Fort de France où j'allais acheter du fil, des agrafes, des boutons pressions, des fermetures éclair, du gros grain ou des rubans de biais et bien d'autres fournitures. Le gros grain servait à faire des ceintures assorties aux robes ou à renforcer la taille des jupes. Je me payais en grapillant quelques centimes sur la monnaie rendue lors de ces achats. Ces courses étaient courantes, car ma mère n'avait pas de stock et elles étaient fonction des commandes. Mais il y avait une corvée que je détestais, c'était la livraison aux clientes qui parfois en guise de paiement me disaient: " Dis à ta manman que je vais passer la voir."
Je n'étais pas un bon encaisseur! 

M. Evariste fier de sa machine professionnelle.


M. Evariste a une clientèle aussi bien féminine que masculine, dans son atelier règne un apparent fouillis qui dans mon souvenir est le propre de tous les ateliers de couture.


Quelques sources d'inspiration sous la protection de la sainte Vierge.
Autre icône de M.Evariste le Che.

M. Evariste à qui je racontais tout cela, me parla à son tour de son métier qui lui permettait de vivre et d'assurer l'éducation de ses deux enfants. Nous échangions pendant qu'il achevait les finitions d'une robe traditionnelle dans un tissu imitation madras. Après avoir pris quelques clichés, je lui promis de lui ramener des tirages.

 J'ai eu le sentiment un instant d'être hors du temps parlant à un survivant.



Et comme toujours je vous dis

à un autre soleil !
a an lot soley ! 




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