dimanche 14 octobre 2012

Curcuma


Les plants de curcuma
Les  curcuma plantés en avril , après le dernier épisode pluvieux se portent à merveille. C'est une plante qui aime la pluie, il lui faut une pluviométrie d'au moins 2000 mm/an et  supporte bien la mi-ombre. Ses rhizomes qui sont consommables ne sont pas récoltables avant dix-huit  à vingt et un mois. Ils entrent dans la composition des "cari" ou "curry" selon l'orthographe que vous préférez.

Je ne peux m'empêcher de penser à ma grand-mère chaque fois que je les regarde pousser, car je regarde souvent pousser mes plantes.
Ma grand mère donc, que nous appelions Manman Do, était une femme indienne qui était maitresse dans l'art de préparer des caris. Elle n'employait jamais le mot cari, mais utilisait les termes colombo et plus souvent colbou  . D'ailleurs depuis que j'ai quitté Saint-Pierre dans le milieu des années soixante, je n'ai pas le souvenir d'avoir entendu employer le mot colbou par lequel elle désignait ses préparations magistrales.

Comment donc s'y prenait elle?
Le mortier familial et son pilon
Elle commençait par choisir quelques belles racines de curcuma qu'elle appelait "mandja". Il semblerait que cette appellation provienne d'un mot indien désignant la couleur de ces racines qui colorent en jaune tout ce qu'elles touchent y compris les doigts de la cuisinière qui les utilise. A partir de ces mandjas elle confectionnait une pâte qu'elle appelait "massalè". C'est ce massalè qui fait toute la réussite d'un bon colombo parfumé et riche en saveurs. Pour réaliser son massalè  elle utilisait un mortier et un pilon en pierre. Au fond de ce mortier elle commençait par mettre une petite poignée de riz grillé qu'elle réduisait en farine . Cette farine de riz assurait la consistance et le liant du massalè. Ensuite elle ajoutait le mandja, une ou deux gousses d'ail, un morceau de piment vert. Je la revois dans sa cuisine, assise sur un petit banc de bois blanc ses jupes ramassées entre les cuisses, le mortier coincé entre les genoux. Le pilon en pierre volcanique noire, manié d'une main ferme était animé d'un mouvement circulaire, jusqu'à ce qu'elle estime avoir obtenu la bonne texture pour son massalè bien jaune, de ce jaune que les peintres appellent jaune indien.
J'avais toujours rêvé d'avoir ce mortier, mais il a atterri chez ma fille. C'est très bien ainsi car elle s'en sert et perpétue la tradition familiale du plaisir de la bonne cuisine .
Mais revenons au colbou de Manman Do. Bien sur en plus du bouquet garni d'oignon-pays y entrent d'autres épices spécifiques appelées couramment les graines à roussir. C'est un mélange de cumin, de graines de moutarde et de fenugrec. Elle appelait ces graines calichidron , cotomili et la troisième j'ai malheureusement oublié son nom. Surtout ne me demandez pas qui est calichidron et qui est cotomili j'ai également complètement oublié.
Sa première opération était de torréfier ce mélange de graines dans son faitout  avant d'y faire revenir ses viandes. J'écoutais crépiter avec curiosité ces graines qui éclataient au fond du récipient car trop petit pour y jeter un oeil. Une fois les viandes saisies, elle ajoutait ensuite son massalè qu'elle avait acidifé au jus de citron , ou en y ajoutant de la mangue verte ou du tamarin vert si c'était la saison. Ensuite avait lieu un long "mijotage" à feux doux sur un tesson à charbon de bois. Je n'ai jamais retrouvé les saveurs de cette cuisine familiale au feu de charbon de bois qui noircissait le cul des casseroles et m' assurait parfois la participation à la corvée de leur récurage à la paille de fer et au savon de Marseille.

Le colombo, accompagné de riz blanc, était toujours le plat principal d'un repas de fête qui rassemblait toute la famille, et parfois des amis autour de la table.

Manman Do et son arrière petit fils Pierre. Noël 1974
Fin 1982 nous voilà Manman Do, son arrière petite fille Cécile et moi

Je vous souhaite de déguster un jour un vrai colombo et vous dis


a an lot soley !
à un autre soleil !

7 commentaires:

  1. Oulala , heureusement que tu étais trop petit, toutes ces graines auraient pu t'éborgner...
    Nous attendons tous de déguster un jour un colbou fait par la Sweet Kwisine grace au mortier et au pilon de Manman Do!
    Moi

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  2. Je suis d'avis également qu'il faille gouter au Colbou de la Sweet kwisine ... mais d'emblée je peux déjà dire que toutes ces graines et les recettes de Manman Do ont éveillés vos palais .... enfin à presque tous , parce que certains malgré les photos ont loupé le coach hihi .
    Sandra

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  3. Je n'ai pas trouve l'origine du mot calichidron , par contre le nom cotomili désigne la coriandre a l'ile Maurice et a la Reunion ou la population d'origine indienne est importante.
    Signe: la documentaliste

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  4. Excellent et que de souvenirs même si je suis un peu plus jeune!

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  5. Ma mam Paul indienne faisait cette même préparation et me disait en creole : passe moi le kotomili ,le,kalichidron et le mandia

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  6. Waouh, j'ai l'impression de revoir ma grand-mère quand, elle aussi, préparait son coulbou . Le calichidron c'est tout simplement un des multiples noms du cumin.

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  7. Et moi aussi je m'y intéresse 👍.

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